Paul Arma

Paul Arma est une figure cruciale de l'histoire de la musique de la Résistance française, tant par les chansons qu'il a composées que par ses efforts inlassables pour préserver l'énorme corpus musical créé pendant la guerre. Paul Arma considérait les chansons de la Résistance non seulement comme des sources d'espoir et des actes de courage en temps de guerre, mais aussi comme des objets importants à sauvegarder en tant que symboles de l'esprit national français. Né en 1905 sous le nom d'Imre Weisshaus, le pianiste, chef d'orchestre et compositeur hongrois Paul Arma a étudié avec Bartok à l'Académie Franz-Liszt de Budapest. Il a travaillé comme chef d'orchestre et de chœur à Berlin et Lepizig jusqu'en 1933, avant d'être arrêté par les SS à Leipzig pour espionnage contre les Allemands et pour ses liens avec l'avant-garde intellectuelle et artistique. Bien qu'il ne soit pas considéré comme une menace suffisante pour être emprisonné, Arma est soumis à un simulacre d'exécution par les SS avant d'être libéré. Il s'est ensuite réfugié à Paris, où il a travaillé jusqu'en 1939 comme pianiste pour Radio-Paris et a écrit des chansons soutenant l'Espagne républicaine pour les Brigades internationales, telles que "Madrid" et "No pasaran" (Ne passe pas). Après l'arrivée des nazis, Arma compose "Les chants du silence" sur des textes de Vercors, Eluard, Romain Rolland et Paul Claudel entre autres, écrivant : "Pendant une période où, en France, la liberté devait se faire dans le silence prescrit... j'ai chanté le silence pour faire chanter la vie". Pendant la guerre, Arma a recueilli en secret plus de 1 800 chansons françaises, dont il a transcrit les mélodies avec sa femme. Après la guerre, il lance un appel à la radio et dans les journaux nationaux de France, d'Espagne, de Hongrie, d'Italie, d'Ukraine, d'Arménie et de Bulgarie, afin de compléter sa collection de chansons. La réponse est énorme : les auditeurs envoient plus de 1 300 chansons. D'octobre à décembre 1945, Arma diffuse un certain nombre de ces chansons à la radio dans le cadre d'une série intitulée La Résistance qui chante. Le 20 octobre 1945, à l'ouverture de sa deuxième émission, il prononce le discours patriotique suivant :

En finir avec la Résistance qui pleure, car la vraie, car la seule Résistance, est celle qui chante comme l'avenir, qui chante comme un matin ensoleillé, comme la jeunesse qui vient, qui chante comme la naissance d'une idée, comme un acte de délivrance, qui chante comme un ciel bleu clair... la vraie Résistance est celle qui chante, qui chante les lendemains ; la vraie Résistance, c'est celle des gens de demain.... Treize cents chants ... constituent l'un des folklores les plus étonnants que l'humanité ait connu ... Nos martyrs avaient dans les yeux un clair triomphe et sur les lèvres un chant. Il est beau que la France ait su sourire et ait su chanter dans sa période de plus profonde tristesse. C'est la plus belle preuve de sa force et la marque la plus durable de notre esprit immortel. Non, la Résistance n'est pas morte : elle revit en chansons. Dédiée à tous nos camarades, voici La Résistance qui chante.

De 1954 à 1984, Arma a mené des recherches sur la musique électromagnétique, ainsi que la réalisation de 81 sculptures en bois et en métal sur le thème de la musique, appelées Musiques sculptées. Dans les années 1980, il obtient la nationalité française, le prix S.A.C.E.M. Enesco, et est fait Chevalier de l'Ordre national de la Légion d'honneur, Officier de l'Ordre national des Arts et des Lettres, et Officier de l'Ordre national du Mérite. Il meurt en 1987 et son épouse fait don de sa collection de musique au Musée régional de la Résistance et de la Déportation de Thionville.

Par Daisy Fancourt

Sources

Chimello, Sylvia La Résistance en chantant (Paris, 2004).